Accéder au contenu principal

B2 - Facebook est-il devenu dangereux ?



Facebook est-il devenu dangereux ?

 | 
Le réseau social Facebook revendique 2,07 milliards d'utilisateurs dans le monde.
Le réseau social Facebook revendique 2,07 milliards d'utilisateurs dans le monde. (Crédits : Dado Ruvic)
L'image de Facebook a été affectée par la propagation des « fake news », ces fausses nouvelles virales popularisées lors de l'élection présidentielle américaine de 2016. Au point qu'on s'interroge : le réseau social aux 2,07 milliards d'utilisateurs est-il devenu un danger pour la démocratie ? Mark Zuckerberg, PDG et cofondateur, s'est donné pour mission de « réparer » Facebook en 2018. Un chantier semé d'embûches.
Miné par la polémique des fake news, Facebook veut se refaire une réputation. Pour 2018, le PDG et cofondateur Mark Zuckerberg s'est donné pour mission de « réparer » le réseau social aux 2,07 milliards d'utilisateurs. « Le monde se sent anxieux et divisé, et Facebook a beaucoup de travail à faire - qu'il s'agisse de protéger notre communauté contre les abus et la haine, de se défendre contre les interférences des États ou de s'assurer que le temps passé sur Facebook soit bien utilisé », constatait début janvier Mark Zuckerberg sur sa propre page du réseau social. « Nous n'allons pas empêcher tous les abus, mais nous faisons actuellement trop d'erreurs pour appliquer nos politiques et empêcher l'utilisation abusive de nos outils. Si nous réussissons cette année, nous finirons 2018 sur une bien meilleure trajectoire. » Comme un air de mea culpa...
En effet, le géant américain a été vivement critiqué l'année dernière pour son manque d'efficacité dans sa lutte contre les fake news, ces fausses nouvelles virales popularisées lors du Brexit en 2016 et amplifiées lors de l'élection présidentielle américaine. Preuve en est que Facebook, conçu en 2004 comme un simple trombinoscope pour l'université de Harvard, a largement dépassé son simple statut de réseau social. Il est même devenu une source d'informations concurrente des médias traditionnels (voir chronologie). Une responsabilité qu'il n'avait pas envisagée lors de sa création.

"Industrialisation des rumeurs"

« Les rumeurs sur Internet ont toujours existé, mais il y a deux nouveautés concernant les fake news. D'une part, on observe un niveau de seuil. Il y a une industrialisation des rumeurs à cause du modèle économique de Facebook. Celui-ci repose sur une économie du clic permettant à des annonceurs publicitaires de rediriger l'utilisateur vers des sites externes proposant des fake news », détaille Romain Badouard, maître de conférences en sciences de l'information et de la communication à l'université de Cergy-Pontoise, auteur du livre Désenchantement de l'Internet. Désinformation, rumeur, propagande (éd. FYP).
C'est pourquoi Facebook a notamment décidé, depuis août dernier, de frapper au porte-monnaie, en les privant de publicité, les pages diffusant des fake news - labellisées comme telles par le réseau social. « D'autre part, il y a désormais une dimension politique des rumeurs avec l'utilisation de fake news à des fins de propagande politique », poursuit le chercheur.
C'est notamment ce qui s'est passé lors de l'élection présidentielle américaine, où une interférence russe a été dénoncée par les élus américains. La Russie est soupçonnée d'avoir mené une campagne de propagande à travers le financement de publicités sur les réseaux sociaux - ce qui a conduit Facebook, Twitter et Google à se justifier devant le Congrès américain début novembre dernier. Lors de cette audition, Facebook a déclaré avoir identifié 3 000 publicités vues par 10 millions d'internautes américains. Et ce n'est pas tout : 80 000 publications - non payantes et soupçonnées d'être liées aux intérêts russes - ont été vues par 126 millions d'Américains entre 2015 et 2017.

Fact-checking contre fake news

Aux États-Unis, Facebook est le premier réseau social pour la consommation d'informations, selon une étude Pew Research sur les usages des plateformes en ligne en 2017. Environ 66 % des Américains utilisent Facebook - parmi lesquels 45 % s'en servent pour s'informer, contre seulement 11 % pour Twitter et 5 % pour Snapchat.
« Facebook est un nouveau genre de plateforme. Ce n'est pas une entreprise technologique traditionnelle. Ce n'est pas un média traditionnel », bottait en touche Mark Zuckerberg, fin 2016, lors de sa dernière déclaration en date à ce sujet.
Dans cette zone grise, Facebook a multiplié les initiatives pour tenter d'éradiquer les fake news, en misant principalement sur la sensibilisation des utilisateurs. Son principal outil : le fact-checking. Après avoir fait un test aux États-Unis en décembre 2016, le réseau social a lancé ce programme en février dernier avec huit médias français - dont Le Monde, Libération, France Télévisions ou encore l'AFP. Si un utilisateur signale une information erronée et confirmée comme telle par deux médias partenaires après vérifications, la publication affiche alors un pictogramme mentionnant que l'information est fausse. L'objectif : réduire sa circulation sur la plateforme. Mais Facebook a jugé lui-même l'outil peu dissuasif fin décembre, avant de procéder à son retrait.
« La recherche académique sur la correction de la désinformation a montré que mettre une image forte comme un drapeau rouge à côté d'un article peut en fait renforcer des croyances déjà ancrées - l'effet inverse de ce que nous voulions », s'est justifié Facebook dans une note de blog.
À la place, le réseau social utilise les « related articles » (en français, des articles apparentés) qui s'affichent lorsque des thèmes spécifiques prennent de l'ampleur sur Facebook. Ils sont alors intégrés dans une petite fenêtre au-dessous du lien de l'article original. Cette mesure ne supprime pas l'article litigieux, elle vise seulement à limiter sa propagation.

Censure ou liberté d'expression ?

Le géant californien s'est ainsi retrouvé au coeur d'un débat sensible : faut-il laisser une entreprise privée supprimer des contenus, et donc établir une forme de censure ? Supprimer des publications s'apparenterait à une restriction de la liberté d'expression. Mais miser sur l'autorégulation fait prendre le risque à Facebook de paraître laxiste en permettant la prolifération des discours haineux et de la désinformation. À cet égard, les États divergent quant aux mesures à adopter.
L'Allemagne a été le premier pays à dégainer une loi pour inciter les réseaux sociaux à réguler eux-mêmes le contenu circulant sur leurs plateformes. Entrée en vigueur le 1er janvier 2018, elle ne concerne pas toutes les fake news, mais uniquement les discours haineux sur Internet (propagande terroriste, insultes, appels à la violence...), y compris, donc, les fake news de ce type. La loi allemande oblige les réseaux sociaux à supprimer sous 24 heures les contenus litigieux - au risque d'encourir une amende pouvant grimper jusqu'à 50 millions d'euros.
« Facebook ne communique pas lorsqu'il supprime des comptes. Ainsi, s'il supprime une page relayant un discours de haine, il est légitime », affirme le maître de conférences Romain Badouard. « En revanche, comme il n'y a pas de transparence à ce sujet, l'utilisateur ne peut pas savoir pourquoi il y a eu une censure. À terme, les citoyens y ont plus à perdre qu'à gagner. »
Face au choix allemand, d'autres préconisent davantage de transparence - comme les États-Unis, mais aussi la France.
Début janvier, Emmanuel Macron a ainsi dit vouloir « imposer des obligations de transparence accrue sur tous les contenus sponsorisés, afin de rendre publique l'identité des annonceurs et de ceux qui les contrôlent, mais aussi de limiter les montants consacrés à ces contenus ». Mais en cas de fake news virale, « il sera possible de saisir le juge à travers une nouvelle action en référé permettant, le cas échéant, de supprimer le contenu mis en cause, de déréférencer le site, de fermer le compte utilisateur concerné, voire de bloquer l'accès au site Internet », a précisé le président de la République.

Niveau B2
Type : Texte argumentatif
Thème : Réseaux sociaux / Facebook / censure / liberté
Source :
https://www.latribune.fr/technos-medias/internet/facebook-est-il-devenu-dangereux-766689.html

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

B2 - Liberté de la presse en France

Liberté de la presse en France: «La situation n’a jamais été aussi mauvaise depuis 2013» PRESSE La France arrive à la 39e position du classement mondial de la liberté de la presse 2017, dévoilé par Reporters sans frontières ce mercredi… Clio Weickert Publié le 26/04/17 à 17h59 — Mis à jour le 26/04/17 à 17h59  Des journalistes face à Emmanuel Macron à Villers-Cotterets le 17 mars 2017 — NICOLAS MESSYASZ/SIPA La France est à la 39e position du classement mondial de la liberté de la presse 2017 La situation n’a jamais été aussi mauvaise depuis 2 013 Un bilan alarmant. Ce mercredi, Reporters sans frontières a rendu son rapport annuel sur la liberté de la presse , accompagné de son classement mondial. Et le constat est sans appel. « Jamais la liberté de la presse n’a été aussi menacée », dévoile RSF , précisant que sur les 180 pays recensés, 72 connaissent une situation « difficile » ou « très grave ». De son côté, dans une situation considé

B1 - Pauvreté en France

Alimentation: Un Français sur cinq est en situation de précarité alimentaire ALIMENTATION Un Français sur quatre déclare ne pas avoir les moyens de s'acheter quotidiennement des fruits et légumes... Une cliente dans un rayon de supermarché (Illustration). — CHAMUSSY/SIPA Ne pas pouvoir faire trois repas par jour et s'alimenter sainement est une réalité pour près d'un Français sur cinq, selon le dernier baromètre Ipsos- Secours populaire publié mardi. Un peu plus d'un cinquième des Français sondés (21%) ont déclaré ne pas être en mesure de s'offrir une alimentation saine leur permettant de faire trois repas par jours et 27% ont admis ne pas avoir les moyens financiers de s'acheter quotidiennement des fruits et légumes. Mais c'est chez les foyers les plus modestes que cette tendance est la plus marquée. Ainsi, plus d'

B1 - Le robot et les enfants malades

 Le robot et les enfants malades Le traitement d’une maladie chronique ou à long terme impose un éloignement scolaire et social à l’enfant. Une start-up norvégienne, No Isolation, propose une solution pour remédier à cet isolement Haut de 27 cm, AV1 (pour Avatar) se pose sur un bureau en classe pour permettre à un jeune qui ne peut pas se déplacer de prendre tout de même part aux leçons. Doté d’une caméra, d’un microphone et d’un haut-parleur, il se pilote à distance depuis une application sur la tablette ou le smartphone de l’enfant. Ainsi le cours donné par l’enseignant est transmis par vidéo en live, sur son écran. Une diffusion qui est volontairement à sens unique, pour éviter à l’enfant d’être vu s’il est changé physiquement. Depuis son lit d’hôpital ou depuis son domicile, l’enfant, en glissant son doigt sur l’application, peut faire tourner la tête du robot à 360 degrés, afin de voir autour de lui, et aussi le faire clignoter